Alors que les gouvernements commencent à mettre fin aux mesures d’incitation et que les premiers utilisateurs ont été largement servis, l’adhésion aux véhicules électriques à batterie (VEB) pourrait être confrontée à des vents contraires. Alors que les équipementiers ciblent le marché de masse, Christof Engelskirchen, économiste en chef chez Autovista Group, explique ce qu’il adviendra des valeurs résiduelles (VR) des voitures d’occasion.
Les politiques encouragent l’adhésion
Même si le nombre d’immatriculations de nouveaux VEB ne cesse d’augmenter en Europe, ce n’est pas la demande des consommateurs qui a favorisé leur adoption, mais la politique mise en place dans le secteur. Preuve en sont les taux d’adhésion, variables selon les pays. Par exemple, au cours des trois premiers mois de 2023, plus de 75 % des nouveaux véhicules immatriculés en Norvège étaient tout électrique, contre environ 5 % en Italie et en Espagne.
C’est dans les pays nordiques que les véhicules électriques suscitent la plus forte adhésion ; ils représentent un tiers des immatriculations de véhicules légers en Suède, en Finlande et au Danemark. En Islande, près de la moitié des immatriculations concernent des véhicules tout électrique. Les Pays-Bas devancent la Chine avec un taux d’adhésion aux véhicules électriques à batterie de plus de 25 %. En revanche, sur les autres grands marchés automobiles européens tels que la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, le pourcentage est inférieur à 15 %.
Part des VEB dans les immatriculations de véhicules légers, premier trimestre 2023, par pays
On serait tenté de croire que le marché du véhicule d’occasion suit simplement les tendances du marché du neuf avec un décalage dans le temps. Cependant, le marché du véhicule d’occasion n’a pas bénéficié de mesures d’incitation gouvernementales. Ainsi, alors que les acheteurs de voitures neuves ont largement profité du passage aux véhicules électriques (VE), les acheteurs de voitures d’occasion n’y ont guère été encouragés.
On le constate dans l’évolution des prix des voitures d’occasion au cours des trois dernières années :
- Les véhicules à moteur à combustion interne (MCI) sont évincés du marché du neuf et la forte demande de véhicules MCI d’occasion se heurte à une réduction de l’offre. Ainsi, le prix des occasions a augmenté davantage que celui de tous les autres groupes motopropulseurs
- Les véhicules électriques hybrides (VEH), sans doute pas très différents d’un modèle MCI, suivent de très près
- Les véhicules hybrides rechargeables (VHR) enregistrent déjà les moins bonnes performances sur le marché de l’occasion
- Les valeurs résiduelles des VEB sont bien inférieures à celles de janvier 2020. Ce sont les VEB qui ont été le moins soutenus par les politiques du secteur, à quoi s’ajoutent les difficultés d’approvisionnement et celles liées à la pandémie au cours des deux dernières années.
Indice des prix du marché de l’occasion par type de carburant, Suède
Le graphique ci-dessus illustre les performances des VR en Suède, un marché où l’adhésion aux VEB est élevée. Les courbes présentées doivent cependant être considérées avec circonspection. Tout d’abord, les transactions de véhicules d’occasion concernent pour la plupart encore des véhicules à moteur à combustion interne. Les courbes des VR des tout électrique sont plus fluctuantes. Ensuite, en raison d’une offre limitée, les performances de marques et de modèles plus présents sur le marché ont un impact plus important sur la courbe des VEB que sur celle des véhicules à essence et diesel.
Les réductions de prix de Tesla freinent les prix de l’occasion
L’analyse de l’indice de prix par marque et non par groupe motopropulseur révèle que le prix des véhicules d’occasion proposé par Tesla ont souffert au cours des dernières semaines, suite à la baisse du prix des voitures neuves de la marque. Cela a pour effet d’orienter la courbe des véhicules électriques à batterie vers le bas, ce qui se répercute sur les autres voitures d’occasion proposées.
Indice de prix du marché des voitures d’occasion par marque, Suède
La dépréciation du cycle de vie touche les véhicules électriques à batterie
Il y a une autre raison pour laquelle les valeurs des VEB d’occasion sont perçues comme moins performantes. Cette technologie est plus exposée à la dépréciation du cycle de vie que les modèles à moteur à combustion interne. Cela s’explique par les progrès technologiques considérables tels que l’augmentation de l’autonomie, qui ont été réalisés ces dernières années.
Les voitures électriques lancées en 2021 et 2022 ont une autonomie moyenne de 450 à 500 km (WLTP). Cela fait baisser le prix de la plupart des VEB d’occasion proposés aujourd’hui, qui ont généralement entre quatre et cinq ans. Ces modèles ont une capacité journalière tout simplement inférieure par rapport aux véhicules lancés plus récemment.
Autonomie moyenne des nouveaux VEB, 2010 à 2022
Ces inconvénients peuvent être quelque peu compensés par une amélioration des infrastructures, mais il s’agit là d’un autre défi de taille. Selon les données du site EV-volumes.com d’octobre 2022, les Pays-Bas comptent plus de 60 00 bornes de recharge publiques.
L’Allemagne, l’un des plus grands marchés automobiles d’Europe, en compte quant à elle environ 36 000. Toutefois, les données de l’Agence fédérale des réseaux du pays indiquent que 69 925 points de charge standard et 13 261 points de charge rapide étaient en service en février de cette année.
L’étude des différentes tranches d’âge des véhicules nous fournit une preuve supplémentaire que la dépréciation du cycle de vie est plus importante pour les VEB que pour les véhicules à moteur à combustion interne. Dans la tranche d’âge des 12 mois et 20 000 km (jeunes véhicules d’occasion), les VEB et les véhicules hybrides surpassent les autres groupes motopropulseurs. Il semble que les acheteurs de VEB d’occasion apprécient les avancées technologiques des nouveaux modèles et qu’ils sont prêts à payer un supplément.
Si on observe la tranche d’âge supérieure des 48 mois et 80 000 km, les VEB ne peuvent pas rivaliser avec les autres groupes motopropulseurs. Cela illustre l’importance de la dépréciation du cycle de vie et l’influence des inconvénients liés à la capacité journalière sur l’achat de VEB d’occasion.
Par tranche d’âge, VR de détail en pourcentage par type de groupe motopropulseur, Suisse
Nouvelle phase décisive pour le VEB
Les pionniers et les adeptes de la première heure ont été largement servis, et les équipementiers ont déclaré que le marché de masse était la prochaine étape. Pour renforcer l’attrait sur le marché de masse, il faut des véhicules plus abordables dans des segments plus petits.
C’est un défi de taille, auquel s’ajoute la baisse des subventions publiques, une tendance qui se poursuivra. Il est peu probable que les acheteurs de voitures puissent ou veuillent supporter une diminution des mesures incitatives. Les prix des voitures neuves ont également connu une forte hausse au cours des trois dernières années, même s’ils baisseront pour les VEB au fur et à mesure des progrès technologiques.
Tesla a pris les devants en baissant les prix de sa gamme de véhicules tout électrique. Le risque d’une guerre des prix autour des nouveaux VE est d’autant plus grand avec l’arrivée de la puissante concurrence chinoise. Le développement et la conception logiciels ont uniformisé les règles du jeu. Aujourd’hui, les nouveaux acteurs trouvent plus facile d’entrer sur le marché automobile européen.
Le manque d’offre de VEB de la part des constructeurs historiques contribuera également à ouvrir la voie à la concurrence des marques asiatiques. Non seulement ces nouveaux venus sur le marché européen seront en mesure de proposer leur gamme à des prix inférieurs à ceux des fournisseurs actuels, mais l’arrivée de nouveaux acteurs constituera également un risque en matière de pression sur les volumes pour les VEB.
Sur le marché de l’occasion, le groupe Autovista prévoit une baisse des valeurs résiduelles pour tous les types de groupes motopropulseurs dans la quasi-totalité des pays européens. L’offre étant toujours limitée, les prix des véhicules d’occasion ne s’effondreront pas. Les VEB souffriront davantage que les véhicules à moteur à combustion interne à mesure que la pression sur les prix s’accroît sur le marché de l’occasion et ce, dans toute l’Europe, sans exception. La dépréciation du cycle de vie, la pression inédite sur les volumes et les prix sur le marché du neuf, ainsi que la transition vers des VE plus abordables, expliquent cet état de fait.
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